Offensive turque en Syrie et “voile” islamique : quelle stratégie pour la France ?

Permise par l’action conjointe des présidents russe et américain auprès de leur homologue turc, la trêve intervenue à la frontière syro-turque le 17 octobre sous la menace de sanctions américaines a été prolongée sine die par la signature d’un mémorandum entre la Fédération de Russie et la Turquie le 22 octobre.
Cette trêve laisse entrevoir, au moins provisoirement, la possibilité d’une résolution de la guerre civile en Syrie, tout en signalant l’entrée dans un nouveau système de relations internationales.
Ce même 22 octobre, le journal Marianne publiait un appel de 101 “Françaises et Français de confession ou de culture musulmane qui se battent contre cette terrible vague néoconservatrice, venue des pays du Golfe arabo-persique, il y a 30 ans”, conjurant leurs compatriotes de ne plus confondre “‘CES’ musulmans orthodoxes, qui prônent le sexisme par le port du voile, réflexe bien plus identitaire que religieux, avec tous ‘LES’ musulmans” (1).
La France, présente en Syrie, en guerre contre le terrorisme islamiste en Afrique, confrontée sur son sol à un communautarisme musulman menaçant l’équilibre de sa société et l’une des principales cibles de la stratégie terroriste de l’internationale islamiste, se doit de mettre en place une doctrine militaire coordonnée à une véritable stratégie de son Etat sur le plan intérieur, aptes à combattre efficacement ces fléaux.

L’offensive turque le 9 octobre à la frontière syrienne, où sont concentrées les populations kurdes de Syrie, semble en effet avoir été tacitement autorisée dans un premier temps par le retrait des forces spéciales américaines qui y étaient positionnées, abandonnant à leur sort les unités des YPG et les forces spéciales française et anglaise, leurs alliées dans la lutte contre l’Etat islamique dans la partie de la Syrie à l’est de l’Euphrate. Les YPG, “Unités de protection du peuple” constituent la branche armée du Parti de l’union démocratique, branche syrienne du PKK, le Parti des travailleurs du Kurdistan turc. Erdogan prétendait ainsi lutter contre le terrorisme : par pure rhétorique celui de l’Etat islamique, mais plus précisément ce qu’il prétend être celui des YPG, et plus précisément encore contre la menace de voir se constituer un Kurdistan autonome en Syrie, alors que de l’autre côté de la frontière, les Kurdes constituent 25% du territoire turc. Ces YPG, dont le nombre s’élève à plusieurs dizaines de milliers de combattants, auxquels se sont joints des milices arabes opposées à l’Etat islamique, ont été les fantassins de l’offensive de la coalition internationale contre l’Etat islamique entre 2014 et 2017, avec notamment la libération de Kobané et celle de Raqqa, ex-capitale de l’Etat islamique en Syrie.

Le blanc-seing donné par le président Trump à l’opération turque n’a surpris que ceux qui n’ont toujours pas compris le cours qu’il entend désormais donner à la politique étrangère américaine, notamment au Moyen-Orient, ni les arrières-pensées qui pourraient avoir présidé à sa décision de retrait. Trump n’a en effet jamais caché, dès son programme de campagne, sa volonté d’en finir avec la politique d’intervention tous azimuts mise en oeuvre par les néo-conservateurs américains et leurs relais dans les chancelleries occidentales, semant partout le chaos au prétexte d’installer la démocratie. Ce retrait général des Etats-Unis laisse une liberté de manoeuvre à d’autres puissances à vocation impériale comme la Chine, une puissance économique totalitaire, ou la Fédération de Russie – puissance pauvre, hypertrophiée sur le plan militaire, et dont le processus démocratique reste inachevé -, et pourrait donner lieu à des coalitions régionales conjoncturelles, comme le processus d’Astana entre l’Iran, la Russie et la Turquie pour régler le conflit syrien. C’est dans ce cadre que la décision américaine prend tout son sens, alors que le président Macron s’évertue à maintenir un “processus de Genève” inopérant.

Rappelons que la Turquie a rejoint le processus d’Astana en 2017, alors qu’une crise avait éclaté avec la Russie en novembre 2015, lorsqu’un Soukhoï-24 de la chasse russe avait été abattu par un F-16 turc, l’un des pilotes tué par une milice turkmène au sol. Entretemps a eu lieu l’échec du coup d’Etat du 15 juillet 2016 mis en oeuvre par une partie de l’armée turque, opposée au pouvoir islamiste néo-ottoman d’Erdogan. Erdogan lui-même a été visé par un attentat à l’hôtel de Marmaris où il passait ses vacances. Prévenu au dernier moment – certains disent par les services russes – il adresse un message à la nation et finit par rétablir la situation, au prix d’une sévère répression. Le fait est qu’après cet épisode a lieu la spectaculaire réconciliation entre Erdogan et Poutine, qui peut alors lui imposer un changement complet de politique en Syrie, contre un hub gazier, une centrale atomique, des missiles S-400 et la réimportation de ses tomates. La Turquie a en effet jusque-là non seulement permis le flux du terrorisme islamiste international venu rejoindre les rangs des terroristes islamiste en Syrie – avec l’appui des Etats occidentaux, dont la France, décidée à faire tomber le régime Assad à n’importe quel prix – mais elle a également pillé l’économie syrienne à Alep et commercé avec l’Etat islamique, notamment pour le pétrole, une fois celui-ci formé à cheval sur la Syrie et l’Irak.

Toujours est-il que le ralliement de la Turquie au processus d’Astana a considérablement modifié la donne dans le conflit syrien, alors que la logistique russe, appelée à la rescousse par Bachar el-Assad au bord de l’effondrement en septembre 2015, avait déjà permis à l’armée syrienne de reprendre le contrôle d’Alep. Les forces terroristes affiliées à Al-Qaïda et l’Etat islamique, bénéficiant jusque-là du soutien de la Turquie, se sont alors regroupées dans la poche d’Idlib, à l’ouest d’Alep. Les tractations en cours, notamment entre Erdogan et Poutine le 22 octobre à Sotchi, visent à échanger le contrôle commun de la frontière turco-syrienne, longue de plus de 800 km, contre la liquidation de ce résidu terroriste d’Idlib. Ce qui aurait pour conséquence, la reprise du contrôle total de son territoire par le gouvernement syrien, appuyé par les Russes, l’une des principales mesures ratifiées par le memorandum du 22 octobre entre la Turquie et la Fédération de Russie reconnaissant l’intégrité territoriale de la Syrie. C’est en effet ce que Trump a en dernière analyse autorisé par le retrait de ses troupes, renonçant au projet de fractionnement de la Syrie par notamment la création d’un Kurdistan autonome. Il faut d’ailleurs remarquer que dès le lendemain de la trêve imposée par Trump aux Turcs, un reportage de Rossiya 1 montrait la jonction de l’armée syrienne et des YPG à Kobané, un commandant de ces dernières proclamant, à une trentaine de mètres de la frontière turque (2), les relations fraternelles entre ces deux forces, décidées à stopper l’agression turque contre le territoire national. Mais le retrait américain pourrait bien s’avérer à terme un cadeau empoisonné, la Russie étant promue au rôle de maintien de la paix dans une région en proie aux conflits et aux changements d’alliances brutaux, elle qui en 2015 jurait ses grands dieux qu’elle ne se laisserait pas embourber en Syrie, clamant sa volonté d’une intervention éclair avec des moyens militaires réduits, afin de neutraliser sur place les terroristes en provenance de l’ex-URSS.

Fabrice Balanche, géographe et spécialiste de la Syrie, rappelle en effet que le conflit syrien, débuté en 2011, a la particularité sur les autres changements de régime opérés dans le cadre des “printemps arabe”, d’être une guerre civile inter-communautaire, exploitée par différents intervenants extérieurs régionaux et internationaux, ce qui explique sa longueur. Ce communautarisme hérité de la période de la domination ottomane a été exploité par le père du président actuel, Hafez el-Assad, appliquant la règle de la division pour mieux régner. La guerre civile longue déjà de huit années n’aurait fait que renforcer davantage les solidarités et les tensions communautaires. Les Kurdes sont historiquement présents dans le nord de la Syrie, mais de façon discontinue, mélangés par endroits à des Arabes ou des Turkmènes, sur pratiquement toute la frontière syro-turque, entre Afrin à l’ouest – où une intervention turque début 2018 provoque le départ de nombreux Kurdes – et Qamishli à l’est, en passant par Kobané, Tal Abyad et Rais al Aïn, outre d’importantes communautés provoquées par les migrations économiques à Alep et à Damas, plus ou moins arabisées. Pendant le conflit les YPG, appuyées par la logistique de la coalition internationale, ont également libéré au sud Hasaka et Raqqa, agrandissant le Kurdistan syrien au-delà de sa zone d’occupation traditionnelle. Ce qui n’a pas été sans “kurdification” de populations arabes, ni sans expulsions de celles qui ont collaboré avec l’Etat islamique. L’un des buts d’Erdogan étant de relocaliser ces populations et d’y ajouter d’autres réfugiés syriens afin de diminuer la présence kurde et de sécuriser la zone selon ses intérêts.

Les YPG ont donc accepté le 22 octobre un retrait à 30 km de la frontière turque, sauf à Qamishli, exclue du mémorandum, mais il y a fort à parier que la résistance kurde donnera du fil à retordre au dispositif turco-syro-russe mis en place pour son application, ou en tout cas défendra fermement les intérêts de la communauté kurde dans le cadre de l’Etat syrien. L’offensive turque, menée au sol avec sauvagerie par des supplétifs terroristes arabes, issus d’al Qaïda et de l’Etat islamique, dont certains ont été armés par la France, s’est d’ailleurs limitée à une bande de 130 km relativement dépeuplée, entre Tal Abyad et Rais al Aïn, villes qu’ils n’ont pas réussi à prendre au terme d’une semaine d’offensive, opposés qu’ils étaient à des forces kurdes aguerries par plusieurs années de combat victorieux contre l’Etat islamique. Il faut d’ailleurs rappeler que le pouvoir central alaouite a entretenu des relations contradictoires par le passé avec la communauté kurde, l’utilisant dans des raids terroristes contre la Turquie lors de la présidence de Hafez el Assad, lequel a également pratiqué l’implantation de populations arabes dans les zones kurdes afin de réduire leur influence. A l’époque le conflit avec la Turquie, pendant lequel le leader du PKK turc, Abdullah Öcalan, a été accueilli à Damas avant de lui être livré, a trouvé une solution avec l’accord d’Adana, en 1998, où la Syrie et la Turquie se sont engagées à lutter contre le terrorisme kurde, autorisant cette dernière à exercer un droit de poursuite sur le territoire syrien, droit qu’elle a invoqué pour justifier son implication dans la guerre civile syrienne. Cet accord d’Adana est d’ailleurs rappelé pour actualisation dans le mémorandum du 22 octobre.

Si la trêve intervenue le 17 octobre et confirmée le 22 se maintient, un nouvel équilibre reste à trouver entre les différentes communautés très rudement éprouvées par huit années de conflits et d’exactions, avec 6 millions de déplacés à l’extérieur et autant à l’intérieur – notamment dans la zone occidentale du pays, tenue par les forces gouvernementales, où toutes les communautés, y compris sunnites, ont trouvé refuge pendant la durée du conflit – ce qui fait en tout plus de la moitié de la population syrienne. Un processus constitutionnel, dont la négociation prendra du temps, est d’ores et déjà entamé dans le cadre d’Astana. La Russie est donc impliquée pour de longues années en Syrie, elle qui a d’autres chats à fouetter sur le plan intérieur, avec vingt millions de pauvres et une économie qui ne parvient toujours pas à décoller au terme de vingt années de règne de Vladimir Poutine. Le système qu’il a mis en place ne permet en effet ni la diversification de l’économie ni les réformes institutionnelles qui en sont la condition. Reste posée la question de l’éventuelle implication de la France, historiquement présente dans la région, et celle de l’Europe, que le retrait global américain oblige à se penser aussi comme puissance diplomatique et militaire face aux défis du terrorisme islamique, de la guerre économique et des migrations.

Il faudrait pour cela un changement total de la politique de la France, à la hauteur des enjeux auxquels elle a à faire face, ce qui a semblé pouvoir se faire à l’occasion de la nouvelle présidence en 2017, occasion d’une rupture, Emmanuel Macron énonçant sa volonté de rompre avec la politique néo-conservatrice de ses prédécesseurs. Mais deux ans et demi après son investiture force est de constater qu’il ne fait que se payer de mots, avec un Le Drian au quai d’Orsay qui, après la Défense sous Hollande, assure la continuité des dossiers, notamment ceux de l’armement des terroristes islamistes contre le régime Assad, aux conséquences désastreuses. Interviewé par Radio-Classique le 16 octobre, Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères du gouvernement Jospin sous Jacques Chirac, “plaide pour une réorganisation réaliste de nos objectifs”. Renaud Blanc commence par l’interroger sur le débat “qui déchire la société française autour du voile” : “en tant que connaisseur et praticien du monde, explique le ministre, ça m’amène souvent sur ces questions de société aigües, a avoir un regard qui ne soit pas simplement que franco-français, et donc ce que j’observe c’est qu’il y a depuis longtemps maintenant dans le monde entier, au sein de l’islam sunnite, une guerre mondiale entre la minorité islamiste – en tout cas il y a un groupe qui parfois est vraiment extrémiste, parfois même 0,1 % terroriste – qui veut réislamiser l’islam, et les musulmans en général. C’est pas l’islam contre nous, c’est une bataille féroce entre la minorité islamiste et les musulmans en général, et cette bataille a lieu partout, que ce soit au Maghreb, en Afrique de l’Ouest, en Asie, partout. Et il y a dans ce monde-là des musulmans, et des musulmanes – je pense notamment aux femmes tunisiennes qui ont reçu le prix Nobel de la paix -, des personnalités, des avocats, des écrivains, plusieurs écrivains algériens d’un immense talent – il y avait autrefois Salman Rushdie -, même ce qu’a dit le roi du Maroc est assez remarquable et lucide et courageux sur ce plan, qui disent : ‘On résiste à ça’. Et pour ces gens-là, en général, et ça veut pas dire que ça se présente exactement comme ça sur la plan franco-français, le voile est un élément de l’offensive. On est trop franco-français dans tous ces débats en général, il faut regarder un peu ce qui se passe ailleurs”.

Blanc lui demande alors s’il est d’accord avec Jean-Michel Blanquer, selon qui “le port d’un voile dans l’espace public n’est pas souhaitable”, et s’il pense qu’on fait preuve de trop de tolérance, ceux qui réclament le droit de porter le voile pour toutes les femmes se trompant de combat. “Je pense qu’ils se trompent de bonne foi, répond Védrine, donc c’est encore pire, certains d’entre eux deviennent ce que Lénine appelait les idiots utiles”. Et il précise : “Je trouve le ministre de l’Education nationale très courageux là-dessus, je pense qu’il a raison. Je suis en contact avec des personnalités musulmanes qui disent : ‘il faut résister à ça, vous ne vous rendez pas compte, cette histoires de voile c’est pas brusquement un caprice d’une jeune-fille ou une question de mode, c’est pas ça, d’ailleurs leurs grand-mères ne portaient jamais ça au Maghreb”. Et de conclure, reliant ce sujet au bilan de la politique extérieure de la France : “Je crois qu’il faut prendre au sérieux cette résistance des musulmans en général contre la dérive islamiste très dangereuse, et on retrouve cette question au Proche et au Moyen-Orient parce qu’un de nos problèmes, c’est qu’on n’arrive pas à hiérarchiser nos objectifs”.

Et alors que Blanc lui pose la question du possible retour sur le territoire national des terroristes islamistes de nationalité française emprisonnés au Kurdistan syrien, qui pourrait être la conséquence du chaos engendré par l’offensive turque, Védrine précise à nouveau : “cette affaire kurde est terrible pour eux, mais c’est une révélation très pénible pour nous, qui montre l’incohérence absolue de nos objectifs – nous les Occidentaux, puis la France, parce qu’il n’y a pas beaucoup d’Occidentaux actifs – : on ne peut pas ces dernières années à la fois dire qu’on va imposer la démocratie en Syrie, donc lutter contre le régime de Damas qui est en effet un régime répugnant, premier objectif, deuxièmement donner l’autonomie aux Kurdes, en essayant de les freiner pour qu’ils ne demandent pas l’indépendance pour que ça ne déclenche pas une guerre générale pendant vingt ans etc, et en même temps lutter contre l’islamisme, ça marche pas ! Alors peut-être que quand on dominait le monde pendant trois ou quatre siècles on arrivait à combiner des objectifs contradictoires entre eux, mais on n’a pas les moyens de nos émotions, on n’a plus les moyens… C’est triste à dire”.

Blanc lui demande alors ce qu’il faut mettre en avant dans cette nécessaires hiérarchisation des objectifs : “Et bien si on considère que l’islamisme est un vrai danger et pour les populations musulmanes elles-mêmes, qui sont de très loin les premières victimes dans tous ces pays, si c’est ça l’objectif numéro un, il aurait fallu, depuis des années, non pas aimer le régime de Damas, qui est effrayant, mais se dire : il faut au moins se coordonner avec la Russie. On peut pas à la fois gérer le bras de fer avec la Russie – une sorte de haine exagérée sur Poutine – et puis au dernier moment dire aussi : ‘On va lutter contre l’islamisme’. On n’arrive pas à hiérarchiser : on peut pas faire tout en même temps. Vous vous rendez compte que si pendant la guerre en 42, et après en 43, si Roosevelt et Churchill s’étaient dit : ‘Il faudrait s’allier avec Staline pour lutter contre Hitler mais on peut pas parce que c’est un régime effrayant’ – et c’était un régime effrayant, il avait déjà tué plus de gens que Hitler à l’époque -, si on avait raisonné comme ça et avec ce méli-mélo de moralisme et de réflexion tactique, qu’est-ce qu’on aurait fait ? Donc là je pense qu’il faut remettre les choses dans l’ordre et la priorité est de rétablir une relation de travail et de coopération avec la Russie, ce que tente – et je l’approuve entièrement – le président Macron aujourd’hui, qui tente de revenir aux fondamentaux de la politique étrangère et ce pourrait avoir des effets au Proche Orient. Donc il n’y a pas de solution miracle et il faut arrêter de faire des promesses qu’on peut pas tenir comme par exemple aux Kurdes”.

L’on se demande donc ce que va faire Le Drian en Irak pour demander à Bagdad de judiciariser les terroristes de nationalité française qui auraient échappés à leurs gardiens kurdes, plutôt que d’en parler avec les Russes, voire même avec Damas, dont l’on peut penser que le sort des détenus terroristes islamistes est l’une de leurs premières préoccupation alors qu’ils prennent la main sur l’administration du Kurdistan syrien, car c’est aussi dans leur intérêt. La cohérence et la hiérarchisation réclamée par Védrine dans les objectifs de la politique extérieure française, ainsi que la capacité d’envisager les problèmes de politique intérieure liés à la montée de l’islamisme dans la société française, en relation avec la menace de la montée de l’islamisme au plan international, la capacité de sortir du nombrilisme franco-français des idiots utiles de l’islamisme dans la classe politico-médiatique, est d’ailleurs réclamée par les acteurs de terrain sur le territoire français. Notamment les maires, confrontés à la montée de l’islamisme dans leurs communes, sans qu’aucune directive ni stratégie décidée par l’Etat ne redescende dans ses ramifications locales, comme l’a expliqué François Pupponi, ancien maire de Sarcelles et député non-apparenté, lors du débat sur les banlieues qui l’a opposé à Eric Zemmour sur CNews le 23 octobre (3). Ce qui donne lieu à toutes sortes de pratiques clientélistes et à des “deals”, qui remettent en cause les valeurs fondamentales de la société française et qui installent progressivement des enclaves communautaristes déchirant le tissu social français.

La situation intérieure de la France comme sa politique extérieure, qui on le voit sont interdépendantes, exige donc qu’une véritable stratégie soit décidée par son Etat, afin de faire face au fléau de l’islamisme aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de ses frontières. La France dispose encore d’une diplomatie et d’une armée qui lui permettent d’être à l’initiative d’une reconstruction de l’Europe, qui ne peut plus se contenter d’être un ilot libéral ignorant de l’histoire qui gronde toujours plus fort de par le monde. Il ne peut donc s’agir que d’une Europe puissance, entée sur ses racine gréco-latines et chrétiennes, qui ont donné au monde la démocratie et le libéralisme, à ne pas vouloir cependant les imposer partout et toujours immédiatement, au risque du retour à la barbarie.

Frédéric Saillot, le 24 octobre 2019

(1) https://www.marianne.net/debattons/tribunes/le-voile-est-sexiste-et-obscurantiste-l-appel-de-101-musulmanes-de-france
(2) https://www.youtube.com/watch?v=z1K9CZj_rp8
Sur l’image illustrant cet article le reporter, Evguenii Podubnyi se trouve le 18 octobre à la frontière syro-turque à Kobané, un drapeau syrien et un fanion des YPG côte à côte juste derrière lui, plus loin à la frontière flotte le drapeau turc.
(3) http://www.ericzemmour.org/2019/10/face-a-l-info-cnews-23/10/2019.html